Histoire d’émotions

Il y a bien longtemps, existait un royaume dont les habitants ignoraient la peur et la tristesse. Ils étaient fiers, courageux, agressifs, très durs avec eux mêmes et avec les autres et au fond, pas très heureux. Peut-on être heureux quand on est agressif, dur et incapable d’admettre les faiblesses des autres et les siennes ? La devise du roi était « sois fort », et elle était gravée sur toutes les façades des maisons, brodée sur les étendards et peinte sur les murs.

Un jour, le roi de ce pays conquit un royaume voisin ; la guerre avait fait beaucoup de morts mais qu’importait au roi ! Ses guerriers étaient prêts à mourir et à tuer sans hésitation. Parmi les prisonniers se trouvait un homme réputé pour sa sagesse et son sens du bonheur. Il comparut devant le roi qui souhaitait connaître son secret.

Le roi lui demanda :

« Dis-moi, homme sage, comment fais-tu pour être heureux ?

- Je m’accepte comme je suis, je m’aime comme je suis, avec mes faiblesses, ma peur, ma tristesse, ma colère. Ainsi je suis serein et donc heureux.

-La colère, je sais ce que c’est » répliqua le roi, « mais la peur et la tristesse sont inconnues dans mon pays. »

Le sage lui demanda :

« Lorsque tu combattais avec tes guerriers, ô roi, comment te sentais tu face aux épées de l’ennemi et aux combattants qui mourraient autour de toi ?

- J ‘étais en colère bien sûr !

- Contre qui ou contre quoi étais-tu en colère ?

- Contre mes ennemis évidemment !

- Pourquoi étais-tu en colère contre eux ? C’est toi qui les as attaqués, ils ne faisaient que se défendre n’est-ce pas normal ? Est-ce une raison pour être en colère contre eux ?

- Hum dit le roi, j’étais en colère parce qu’ils tuaient mes guerriers, certains étaient mes amis.

- Dans ce cas, tu étais triste de la perte de tes amis et non pas en colère.

- Mais ils étaient menaçants, ils risquaient de me tuer moi et mes proches, c’est donc normal d’être en colère !

- Tu avais donc peur ! Peur de la mort, peur de perdre des être chers."

Et voilà comment le roi et tous ses sujets découvrirent qu’ils avaient toujours connu la peur mais qu’ils lui donnaient un autre nom : la colère. Et qu’ils faisaient de même pour la tristesse. Et du jour où ils donnèrent leur vrai nom à leurs émotions, la joie qui avait déserté le pays réapparut en souriant.

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